Il y a trente ans commençait le génocide des Tutsi au Rwanda. Mais que signifie vraiment « il y a trente ans » ?
Au-delà des questions de commémorations et de mémoire, au-delà des débats nécessaires sur la responsabilité de la France et de la communauté internationale, au-delà même du rôle que peut jouer l’histoire – et d’une manière générale les sciences sociales – dans la compréhension de l’engrenage génocidaire, c’est bien la question vertigineuse de ce qu’est un passé récent qui se pose à nous toutes et tous, depuis le Rwanda.
Un passé, assurément, quand tant de survivantes et de survivants aspirent à y échapper pour se projeter vers l’avenir, même si nombre d’entre elles et d’entre eux se retournent et l’affrontent, explorent les lieux où il se terre. Mais un passé récent, qui demeure encore vivace, cuisant, à bien des égards inassimilable, même s’il s’inscrit déjà dans l’échelle de temps d’un événement de longue durée. En ce sens, le génocide des Tutsi au Rwanda est pleinement intégré, avec des spécificités historiques, avec des mémoires familiales et des deuils personnels, à une condition historique que nous avons en partage. Car nous savons bien, d’expérience, qu’en matière d’instrumentalisation des mémoires et de falsification de l’histoire, après trente ans commence souvent une période dangereuse. D’où sans doute la nécessité d’engager dès aujourd’hui
une réflexion collective sur les modes de réappropriation de cette histoire.
Au-delà des spécialités académiques, des barrières entre les champs savants et artistiques, la revue numérique Entre-Temps, rattachée à la chaire de Patrick Boucheron au Collège de France, propose deux tables rondes sur ce qui est au coeur de sa ligne éditoriale : la mise en valeur et en dialogue d’expériences de transmission, d’enseignement et de création.
Événement organisé par la revue Entre-Temps.