Si l’on doit juger du développement par la capacité des pays moins développés à rattraper les pays les plus avancés et, par conséquent, à diminuer la pauvreté, les performances de ces dernières décennies doivent être qualifiées de « mitigées ». Certains pays, notamment en Asie, et la Chine en premier lieu, ont connu un indéniable succès. En revanche, les niveaux de vie de l’Amérique latine sont restés à peu près au même niveau par rapport à la moyenne mondiale, tandis que plusieurs pays d’Afrique subsaharienne ont vu s’accentuer leur retard initial. En proportion de la population mondiale, la pauvreté a diminué. Mais, en nombre absolu de personnes pauvres, ce n’est que sur les toutes dernières années qu’elle a commencé de régresser. Et, dans les deux cas, le progrès tient avant tout aux performances exceptionnelles de la Chine. Aujourd’hui, 1,3 milliard d’habitants de la planète vivent encore dans le dénuement, avec moins d'un euro par personne et par jour, en pouvoir d’achat des pays développés.
Faut-il en conclure, comme le font certains, que, à quelques exceptions près, l’économie et la pratique du développement ont purement et simplement échoué et que l’on a peu appris des expériences nationales de développement telles qu’elles se déroulent depuis 50 ans ? Le mieux que nous puissions faire aujourd’hui est-il alors seulement de venir en aide aux plus pauvres du monde en leur apportant un complément de pouvoir d’achat ou en les aidant à assurer l’éducation et la bonne santé de leurs enfants ? Et faut-il renoncer à trouver le moteur de croissance qui permettra de créer les emplois productifs grâce auxquels les individus pourront améliorer leurs conditions de vie ?
Nous n’en sommes pas là. Un savoir s’est accumulé sur les mécanismes du développement et la lutte contre la pauvreté. Il montre une extraordinaire variabilité, dans l’espace et dans le temps, de ces mécanismes, des contraintes auxquelles ils sont soumis, et des politiques à mettre en œuvre, et par conséquent la formidable difficulté de généraliser à partir d’expériences individuelles. Il montre aussi les erreurs commises en s’en remettant à une vision trop simple et souvent doctrinale du développement économique. L’objectif de ce cours était donc d’évaluer ce savoir en revenant sur les grands débats de l’économie du développement à la lumière des éléments théoriques et empiriques dont on dispose aujourd’hui. On en présente ici quelques idées fortes.