Cours

Les littératures perdues d’Asie centrale sauvées par les arts figurés

du au
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Pendjikent (Tadjikistan), détail d'une peinture murale, vers 740 : une variante sogdienne du thème de La Belle et la Bête (la jeune fille frappée d'un sort va puiser de l'eau et rencontre le démon aquatique) - © Boris Marshak

L'Asie centrale préislamique a produit dans trois langues moyen-iraniennes (parthe, bactrien, sogdien) une grande quantité de textes, mais la majorité de ce qui nous est parvenu est constituée soit par des traductions de textes religieux étrangers connus par ailleurs, soit par des documents de la pratique, auxquels s'ajoutent dans le cas du bactrien des proclamations royales. La littérature au sens où nous l'entendons (la fiction narrative, la poésie) n'a-t-elle eu qu'une existence orale, ou alors a-t-elle fait naufrage dans la transmission ? L'objet du présent cours est de démontrer que l'une comme l'autre idées sont partiellement fausses et qu'une grande partie de cet héritage s'avère de plus en plus récupérable, sous forme tantôt écrite et tantôt picturale. En parthe, les hymnes manichéens sont depuis longtemps connus mais certes ils n'ont pas circulé en dehors de la communauté. Le sogdien a conservé quelques textes originaux relevant soit du bouddhisme, soit du zoroastrisme, soit de l'épopée profane, qui manifestent une réelle créativité. Plusieurs sont rythmés selon des règles de prosodie qui ont été récemment élucidées. Les contes manichéens rédigés en sogdien et retrouvés à Turfan puisent à un fonds très divers, surtout indien mais aussi ésopéen ou biblique. Eux non plus n'ont pas été transmis à d'autres littératures, mais un nombre croissant de contes issus des mêmes répertoires peut être identifié sur des peintures murales de Pendjikent (Tadjikistan), ainsi que plusieurs cycles épiques dont certains annoncent des épisodes qui seront plus tard « canonisés » en persan par le Livre des Rois. Le grand absent du dossier reste la poésie lyrique, dont quelques restes ont cependant survécu.

Références d'orientation

Walter Bruno Henning, « Sogdian Tales », BSOAS, 1945, pp. 465-487.

Boris Marshak, Legends tales, and fables in the art of Sogdiana, New York, 2002.

Frantz Grenet, « Between written texts, oral performances and mural paintings: illustrated scrolls in pre-Islamic Central Asia », dans Orality and textuality in the Iranian world, ed. J. Rubanovich, Leiden, 2015, pp. 422-445.

Pavel B. Lurje, « More on Sogdian versification: translated and original compositions », dans Studia Philologica Iranica. Gherardo Gnoli Memorial Volume, ed. E. Morano, E. Provasi, A.V. Rossi, Rome, 2017, pp. 243-256.

Cette année le séminaire est remplacé par le colloque « Sogdiane : état des connaissances et recherches en progrès » coorganisé avec l’UC Berkeley et l’Institute for the Study of the Ancient World (New York), 2-3 juillet 2025, à l’École normale supérieure, 29 rue d’Ulm, 75005 Paris (amphi Jaurès). 

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