du au
Voir aussi :

Argument

Cette séquence de cinq leçons est la conclusion d’une série de leçons données au Collège de France en 2003-4 et 2004-5 sur le même thème. Le problème posé est celui de l’impact des avancées bio-médicales sur notre conception de l’humanité : en deux siècles de développement de la biologie et de la médecine « l’homme des Lumières » ou « homme moderne » est-il encore d’actualité ? 

  1. Le projet d’une anthropologie philosophique, aussi ancien que la philosophie (« connais-toi toi-même »), se redessine au XIXe siècle avec la naissance des sciences humaines et sociales, à la frontière entre sciences naturelles et sciences de l’esprit. Que devient notre image de l’homme, confrontée aux performances des sciences du vivant ? Faut-il renoncer à définir l’essence de l’homme pour évoluer vers une réflexion sur son devenir ?
  2. Seconde moitié du XIXe siècle. La biologie des populations (transformisme de Lamarck, puis évolutionnisme de Darwin) situe l’espèce humaine dans la continuité de la série des vivants, et révèle en même temps la magnificence et la cruauté de la lutte pour la vie : un doute est jeté sur l’aptitude de la civilisation à infléchir (moraliser) la dure loi de la sélection naturelle (ou mal métaphysique). Faut-il suivre la nature, ou la combattre ?
  3. Première moitié du XXe siècle. La biologie des organismes, en adoptant des méthodes d’investigation rigoureuses, introduit un style de recherche (objectivant, naturalisant, insoucieux du pathos) qui paraît incompatible avec l’humanisme traditionnel, en médecine comme en physiologie animale. En Europe continentale, le grand mouvement qui se nomme « anthropologie philosophique » vise à réconcilier science et humanisme.
  4. Seconde moitié du XXe siècle. Avec la découverte de la structure moléculaire de l’ADN, puis le déchiffrement du code génétique, l’ingénierie génétique prend son essor. Les biotechnologies font naître une biologie de synthèse, dans le sillage de la chimie de synthèse. On crée souris transgéniques et veaux clonés. La médecine, entre greffes et thérapies cellulaires, se veut « régénérative ». Certaines possibilités épouvantent, on craint des « crimes contre l’espèce humaine » (mal moral). Qu’en est-il de l’être humain, exposé à l’action des biotechnologies ?
  5. Kant disait qu’on se plaint depuis toujours que le monde va mal, et que croire le contraire, i.e. penser qu’on va du mauvais vers un mieux, est une « opinion héroïque ». Darwin, au soir de sa vie, jugeait que tout bien pesé, et malgré l’âpreté de la sélection, le monde vivant recèle plus de bonheur que de souffrance. On examine dans cette leçon les projections anthropologiques de quelques philosophes contemporains qui ont réfléchi sur l’apport des sciences du vivant : responsabilité, dignité, compassion, individualisme ouvert, individuation collective...