Parmi tous les historiens d’art qui ont fondé, durant le XIXe siècle, la discipline grâce à leur enseignement et à leurs publications, Jacob Burckhardt (1818-1897) reste le seul auteur de langue allemande, dont les ouvrages, « Cicerone », « L’Architecture de la Renaissance en Italie » et « Souvenirs d’après Rubens », sont lus aujourd’hui avec autant d’intérêt qu’hier. La modernité de Burckhardt se manifeste non seulement à travers ses essais de lier les arts avec la civilisation de telle ou telle époque, mais aussi dans ses hésitations à expliquer la genèse et l’essence de l’art par les mêmes facteurs qui conditionnent la civilisation d’une nation. Burckhardt est resté en quelque sorte, tout au long de sa vie, le « saltimbanque » (ainsi que le nommaient ses amis) qui aimait s’engager dans des contradictions fructueuses, combiner sans cesse ses observations, ses pensées et ses principes, de façon originale. Mes conférences tentent de mettre en lumière les idées directrices de Burckhardt, historien d’art, sans l’enfermer dans une méthode stricte – ce qui serait aussi inadéquat pour lui que pour son collègue bâlois Friedrich Nietzsche. Quand on parle de méthode en histoire de l’art chez Burckhardt, il faut tenir compte de ce qu’il disait : « Nous n’avons aucune méthode, en tout cas pas celle des autres ». Burckhardt est connu comme le grand propagateur de l’art de la Renaissance italienne, mais il admirait au même titre, l’art néerlandais du XVIIe siècle. Dans les notes préparatoires pour ses cours en histoire de l´art – notes qui seront publiées en 2006 dans le volume 18 des Œuvres de Jacob Burckhardt, aux Éditions Beck (Munich) et Schwabe (Bâle) – on reconnaît un historien d´art de vision universelle, curieux, fortement impressionné par tous les styles et toutes les époques où les artistes travaillaient en toute indépendance vis-à-vis des commanditaires et sans exagérer leur originalité. Burckhardt a introduit une éthique destinée aux artistes, qui combine à la fois des conditions morales, sociales et artistiques grâce auxquelles l´Œuvre d´art doit son existence et sa valeur éternelle. C’est par son langage sobre, précis et dont l’expression est imagée, qu’il a cherché à maîtriser tous les problèmes qui se présentaient dans le vaste champ de l’art se référant à l’histoire et vice versa.
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Conférencier invité
« … de l'art, nous devons parler »
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