Ce quatrième colloque consacré à la hiéroglossie (l’étude de la relation qui s’instaure à l’intérieur d’un groupe de langues dont l’une fait figure de langue centrale, sacrée ou dominante) aura pour thème principal la diffusion et l’usage de la langue chinoise littéraire telle qu’elle s’est imposée dans l’ensemble de l’Extrême-Orient, en Chine même, en Corée, au Japon et au Vietnam depuis le très haut Moyen Âge jusqu’au XXe siècle, avec une attention plus particulière portée à la situation japonaise.
Il convient de distinguer au moins deux aspects de cette universalisation sinoglossique : d’une part, l’usage direct du chinois classique pour la composition écrite, fondé sur l’enseignement des textes chinois classiques dont la liste canonique s’est diffusée dans toutes les régions concernées ; d’autre part, l’influence du chinois classique sur la formation littéraire des langues régionales, celles-ci se restructurant à la fois dans leur vocabulaire et dans leur grammaire afin de transmettre de façon adéquate le contenu des textes chinois. Il faut relever ici l’importance exemplaire de la méthode de lecture dite « explicative » (kundoku) qui s’est répandue au Japon et qui consistait à systématiser la transposition orale d’un original chinois vers la langue japonaise, avant de constituer l’un des fondements du style littéraire proprement dit. Bien que le modèle japonais soit le plus finement élaboré, on en retrouve d’analogues à des degrés divers dans toutes les cultures périphériques de la Chine.
Une importance particulière sera accordée à la situation actuelle de la sinoglossie en Asie orientale, où l’on peut discerner un décalage entre la conscience ordinaire qu’ont les responsables politiques de l’éducation, les enseignants, écrivains, journalistes de la sinoglossie, conscience qui est soit très vague, soit hostile ou négative, et la situation linguistique : la suppression des caractères chinois n’a nullement aboli la sinoglossie, elle n’a fait que rendre les choses plus difficiles à appréhender.
Le colloque, qui se déroule sur deux jours et réunit quatorze participants, se propose d’examiner les deux facettes de la sinoglossie, des débuts historiques jusqu’aux changements apportés par l’époque moderne, changements qui ont pu diminuer les aspects visibles de la sinoglossie mais dont l’impact a été beaucoup moins important sur les strates profondes des langues « sinoïdes ».