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Présentation de la chaire
Comment fonctionne le cerveau humain ? Sur quels algorithmes s’appuie-t-il pour reconnaître un visage, un chiffre ou un mot, et en comprendre le sens ? Comment le combine-t-il à d’autres symboles au sein d’une phrase ou d’une proposition mathématique ? Comment ces opérations sont-elles matérialisées dans les circuits neuronaux du cerveau humain ? Et pourra-t-on les comprendre au point d’en développer des modèles mathématiques et de les simuler dans des logiciels d’intelligence d’artificielle ?
La psychologie cognitive expérimentale regroupe l’ensemble des disciplines qui traitent de ces questions. Longtemps confinée à l’analyse des productions et des comportements humains, elle s’appuie aujourd’hui sur des technologies avancées d’imagerie cérébrale et de décodage neuronal qui tentent de jeter des ponts entre architecture neuronale et représentations mentales. Mes cours abordent, année après année, l’ensemble des méthodes contemporaines d’analyse des relations entre pensée et cerveau, et leurs principaux résultats dans le domaine de la psychologie du langage, des mathématiques, de la conscience, de la métacognition, ou de l’apprentissage.
Mes recherches sont principalement réalisées au centre NeuroSpin, sur le plateau de Saclay, où le CEA dispose d’un vaste plateau technique d’IRM, d’électro- et de magnéto-encéphalographie, chez l’adulte comme chez le jeune enfant. J’utilise ces techniques d’imagerie cérébrale pour étudier la question de la singularité du cerveau humain. Pourquoi sommes-nous la seule espèce capable d'arithmétique, de géométrie, de langage, de lecture... ?
Mon hypothèse est que tous les primates partagent le même « noyau de connaissances » (core knowledge) qui leur permet de représenter les nombres, l'espace, les séquences sonores… et sur lesquelles s’appuie le développement des symboles du langage et des mathématiques (théorie du recyclage neuronal). La singularité du cerveau humain résiderait dans la capacité d’assigner aux concepts des symboles discrets et de les composer pour former des expressions imbriquées, de véritables « programmes mentaux » avec une organisation récursive. Cette faculté de composition récursive ne serait pas propre au réseau du langage, mais serait présente dans de multiples réseaux parallèles pour le langage, les mathématiques, la musique, la théorie de l'esprit, etc.
Mes expériences testent actuellement ces idées, non seulement chez des adultes français, mais aussi, en simplifiant les paradigmes, chez de jeunes enfants, des adultes non scolarisés, et chez des primates non humains, afin d’examiner s’il est possible d’isoler un format de représentation mentale propre à l’espèce humaine.
J’étudie également le traitement conscient et non conscient de ces objets mentaux, avec l’hypothèse que l’accès à la conscience correspond à l’activation soudaine, ou embrasement (ignition), d’un espace spécifique de représentation mentale, l’espace de travail neuronal global (global neuronal workspace). Cet espace semble exister chez tous les primates, mais avec l’évolution de la capacité de composition symbolique, je fais l’hypothèse que son contenu est devenu bien plus riche dans notre espèce.